Qui peut rester impassible devant un livre qui porte sur le « dévoilement du Messie » ? Chrétiens, nous assimilons sans hésitation Jésus-Christ au Messie. Je savais que la notion, dans le judaïsme, était plus subtile. Le Messie était-il un être humain, une époque, des manifestations, un état d’esprit ? Aussi, lisant la critique de Gilles Donada parue dans La Croix du jeudi 14 décembre, je me suis empressé d’acheter ce livre de 170 pages organisé en 13 chapitres.
Nous sommes plongés dans l’univers de la kabbale . J’invite chacun à lire le début du chapitre 1 ( page 21) pour goûter les interprétations du 8ème jour, de la circoncision, en relation avec le retranchement de Dieu du monde nommé Tsimtsoum chez les kabbalistes et la lecture de la mort comme parachèvement de la vie, et non sa fin.
Au fil des chapitres, différentes définitions du Messie apparaissent :
P 27 : le Messie est celui qui donne la vie en nommant, comme Adam. La référence au 8ème jour (celui de la circoncision, celui de l’après-shabbat, celui de l’Alliance par excellence) s’éclaire.
P 38 : Le Messie est celui qui permettra au troisième temple de descendre du ciel (sur l’esplanade où furent construits les deux précédents et où est actuellement édifiée la mosquée Al-Aqsa)
P55/56 : le Messie est le maître du langage, il brise les frontières en répandant la Torah dans le monde entier ( avec un étrange détour par le rôle de la France, le pays où la monarchie a été tuée en la personne du roi)
P 76 Le Messie est « fils de David » au regard du livre d’Esther, celle qui délivre du génocide promis par Aman, symbole que les forces du mal contiennent au plus profond d’elles-mêmes ce qui les constituent fondamentalement, à savoir le bien.
P75 : le Messie réunit ce qui est diffracté, eu égard aux deux principaux noms de Dieu, Elohim et Yaveh (en référence au tétragramme YHWH). Le Messie (p81) unifie les noms divins en réunifiant l’arbre de la connaissance (associé à Elohim) à l’arbre de la vie (associé à Yaveh) (on y revient plus tard)
P86 : Le Messie doit faire que la courtoisie devienne le chemin du monde, le salut du monde relevant de l’acte de courtoisie le plus spectaculaire qui soit.
P 107 : par le Messie, la Torah révélée (la Torah écrite) dévoile la Torah cachée (celle qui n’est que commentaire oral)
P 114 : le Messie a affaire avec l’essence divine
P 121 : le Messie, selon une légende juive, devrait naître le 9 av, jour de la destruction du Temple, et selon un calcul compliqué, en 1948 , date de la proclamation de l’Etat d’Israël. A moins qu’il ne s’agisse que d’un jeu et que, p 124, le Messie est toujours autre chose que ce qu’on attend, et cela parce qu’il dépasse toutes raisons.
P 128 : le Messie prépare l’au-delà de tous les hommes. P 133, il assure la solidarité entre tous les individus entre eux mais aussi entre les générations
P 162 : le Messie fait parler le texte, dévoile le caractère surnaturel de la Torah, la dévoile dans son évidence.
Je voudrais insister sur un passage qui éclaire le drame humain. Cf pages 99 et s et 130 et s. Les premiers mots de la Bible sont Bereshit bara Elohim Eth « Au commencement Dieu créa ». Le B a pour valeur 2, nous indiquant que notre monde est et sera toujours marqué par la dualité. Cette dualité, qui nous marque tant à titre personnel, se retrouve dans les deux arbres du paradis : L’arbre de la connaissance, associé au Messie ben Joseph, et à la Torah révélée ; l’arbre de vie, associé au Messie ben David et à la torah cachée. Sur Joseph, cf page 102 à 106.
La page 130, en lien avec la page 108 et 106, nous indique que, selon la métaphysique juive, le monde était destiné à coïncider avec l’arbre de vie. L’homme a mangé le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, trop tôt. Ce fruit lui était promis, il l’a volé à son calendrier. Du coup, l’homme survit. Son savoir n’est qu’un écran qui lui masque la réalité. Mais avant que l’humanité ne se précipite dans l’abime surviendra le salut (cf le livre d’Esther), nommément l’arbre de vie, dont personne n’a idée de ce qu’il est. Ainsi l’arbre de vie englobe l’arbre de la connaissance, comme le Messie ben David englobe le Messie ben Joseph.
Il est dommage que ce passage sur le drame humain soit éclaté en plusieurs passages car sa lisibilité y perd de la force. On peut également regretter la conclusion, sous-titrée Le dévoilement -résurrection. On y apprend que les âmes des morts, comme celles des vivants, attendent le Messie p 168. Mais on aurait préféré un véritable propos de conclusion qui tire l’enseignement de ce petit livre.
Crédit photo : aiophotoz.com
Cher Patrice, depuis longtemps je me demande d’où est venue l’idée d’un Messie,devant la dureté du monde, l’homme rêve d’une baguette magique? Où y a-t-il un fondement qui permet de rêver? On peut en parler à une prochaine occasion? fraternellement Monika