Vivre autrement – de Corinne Lepage

Vivre autrement – de Corinne Lepage

Grasset –  2009

L’introduction pose très bien le problème :  allons-nous manquer la chance historique d’inventer, sous la contrainte de la crise actuelle, un modèle de développement compatible avec le monde fini, nos besoins et notre survie ?

 Nous avons 4 défis majeurs : eau, biodiversité, pollution chimique, changement climatique

Pour elle, il y a aggravation des inégalités entre Etats (ceci étant masqué par la croissance massive de la Chine) et au sein des Etats.

 Elle cite G Lipovetsky qui décrit la crise actuelle comme l’aggravation d’une culture-monde structurée autour de 5 traits : néolibéralisme, consumérisme, techno-science, individualisme, ordre médiatique.

 Elle stigmatise les lobbies et notre confiance absolue dans le progrès technique

Notre prison la plus réelle est celle de notre représentation du monde et, selon JP Dupuy « plus un risque est grand, plus il est nié, tant l’imaginaire se refuse à accepter ce que représenterait pour l’individu la réalisation du risque »

L’ouvrage s’organise ensuite en trois parties.

 La première traite du nouveau modèle de développement économique

La vraie question est de comprendre quel type de développement est compatible avec la maintenance de notre biotope, ce qui suppose  (p36) une économie symbiotique ou circulaire reposant sur le recyclage et la parcimonie, une économie de fonctionnalité visant à substituer l’usage d’un bien à sa propriété, une économie de service, qui valorise le bien-être et non la quantité de biens et services donnant lieu à transaction monétaire.

Elle réfute les notions de croissance ou de décroissance pour défendre celle d’évolution soutenable (p41 et s). Ceci suppose de passer d’une vision en termes de flux à une vision en termes de stocks, de la notion de revenu monétaire à celle de capital patrimonial.

 Le patrimoine  collectif est le capital naturel, social et culturel.

 Passer d’un idéal de prospérité partagée à un idéal de bien vivre ensemble ( p45)

Cette révolution fait de l’économie un sous-système de l’écologie, définie comme l’écosystème global (p47)

Elle défend la notion d’économie écologique et se réfère à celle d’économie de guerre, avec ses deux difficultés majeures : l’accroissement de la productivité et la répartition de la pénurie. Ceci suppose un changement de la comptabilité qui doit s’adapter à la vision patrimoniale retenue

 Compter autrement,  réguler autrement pour financer l’évolution soutenable, taxer ce qui est mauvais et socialement coûteux, favoriser les reconversions industrielles., passer en somme d’un homo economicus à un homo civis.

Elle envisage la disparition d’entreprise de l’ère industrielle, d’immenses problèmes sociaux. Les changements de consommation, sous l’effet de la nécessité, la restructuration des entreprises et le développement d’activités économiques davantage liées à la connaissance.

La seconde partie  traite de la société de transition, dans laquelle nous sommes déjà entrés. (p 69 et s). C Lepage multiplie les exemples de réalisations concrètes dans plein de domaines :

 Consommation énergétique qui va vers la décentralisation énergétique  (elle  critique violemment le modèle jacobin nucléaire d’EdF).

Produire autrement en prenant la Nature comme modèle : elle cite de nombreux exemples, biomorphisme, industrie néobiologique , fabrication d’objets fonctionnant comme les productions de la Nature. (ex : un fab lab est un laboratoire de CAO et de fabrication de biens manufacturés en libre service)

Cultiver autrement, se nourrir autrement (un pêcheur industriel est  200 fois plus subventionné qu’un pêcheur traditionnel),  favoriser les circuits courts,, l’agriculture urbaine

Habiter et vivre en ville autrement (toits photovoltaïque, exemple de Vancouver, la ville dense, se déplacer autrement), se soigner, apprendre,  travailler, finance autrement…

 La troisième partie traite de civiliser le futur en jetant les bases d’un nouveau monde

Dans cette partie, C Lepage réfléchit aux changements institutionnels qu’il faudrait réaliser à une dimension macro.

La politique  appelle un nouveau projet démocratique (p149 et s) visant à décider collectivement de l’avenir. Notre modèle politique est obsolète. Le système démocratique est à réinventer à l’interface de la démocratie représentative et de l’e-démoratie, à l’interface du rôle de consommateur responsable et de citoyen (p152)

 La démocratie doit se définir comme un régime qui vise à répartir le plus justement possible les biens premiers, droits et libertés de base… et à  corriger les inégalités de capacités. (p132)

La consommation ne peut plus reposer sur les désirs mimétiques, la comparaison et la compétition (p135)

Il faut passer l’obstacle de la préférence pour le présent (p138)

Dans sa conclusion, elle évoque plusieurs scénarii et conclut qu’il nous revient collectivement de choisir notre scénario

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Patrice Obert