Comment peut-on être catholique ? – de Denis Moreau

Comment peut-on être catholique ? – de Denis Moreau

Seuil 2018

Des articles relatifs à ce livre sont parus dans Le Monde et dans La Croix en janvier 2018. Celui de La Croix présente bien le livre, son style et son organisation.

 La présente fiche  traduit uniquement  mon ressenti  suite à la lecture, notamment en tant que président des Poissons Roses.

Denis Moreau m’a en fait signalé par mail la parution de son essai en me faisant miroiter qu’il avait une petite sympathie pour les Poissons Roses dans un des chapitres. J’ai acheté le livre et me suis rendu immédiatement au chapitre 17 (un des derniers), intitulé « Parce que j’aime bien les catholiques de gauche (et moins le capitalisme déchaîné) ». L’auteur consacre ainsi 25 pages (sur les 348 de son livre) aux cathos de gauche. C’est déjà assez rare pour le mentionner. Il prévient tout de suite qu’il les aime d’autant plus que c’est « une espèce en voie de disparition » (p291), expliquant que « le catholicisme de gauche français des années 1970 constitua un des sas de sortie du catholicisme »(p293). Il cite ensuite plusieurs textes  (Péguy en 1914, le jésuite Bourdaloue au 17ème siècle, Bossuet en 1659) qui dénoncent avec une force incroyable le pouvoir de l’argent. Il s’appuie également sur  Pasolini et les déclarations et encycliques des papes, de Léon XIII à François,  faisant ainsi référence à la doctrine sociale de l’église,  pour reprocher aux socialistes leur angélisme et leur faiblesse à combattre le « nouveau pouvoir de la consommation, qui est complètement irréligieux, totalitaire, violent, faussement tolérant, et même plus répressif que jamais, corrupteur, dégradant » (texte de Pasolini de 1974, d’une étonnante actualité).

Il reproche ainsi à la gauche de ne plus avoir le courage de « faire la morale » (p308) et  demande qu’on ose de nouveau « parler d’éthique en politique » (p309).  Suivent deux pages qu’on croirait écrites par un Poisson Rose (pages 310 et 311 jointes).

Il conclut ce chapitre  en disant qu’il faut se méfier du diable et en exhortant chacun au combat spirituel et politique.

Et les Poissons Roses, me direz-vous ? Il faut aller à la page 302  et plus précisément à la note de bas de page pour lire « je choisis ce chiffre [de 12 entre le salaire le plus élevé et celui le plus bas] parce que c’est celui que proposent les « Poissons Roses » (le courant chrétien du Parti socialiste) et pour sa symbolique biblique… ». Un peu court, Cher Denis, aurait-on envie de lui dire… Pas même la mention de « A contre courant », notre manifeste où vous avez pioché cette proposition, alors que vous inondez vos lecteurs de références savantes… Dommage  d’être si proche de nous par vos idées  et si laconique pour nous présenter ou nous défendre un tant soit peu….

A la suite de ce chapitre, je suis allé illico à la conclusion, laquelle m’a donné envie de lire tout le livre à partir du début.

Autant dire que j’ai beaucoup aimé le livre ; peut-être parce que je me suis reconnu dans cet auteur et ses réactions qu’il sait rendre très vivantes, face au catéchisme officiel, à sa volonté rationnelle de comprendre, face aussi  aux difficultés qu’il rencontre, tant dans la société, que dans son for intérieur. Un « honnête chrétien  du quotidien » dirais-je, qui aime réfléchir, lire, écouter du hard rock, manger et boire, qui décrit très bien la vie quotidienne d’un chrétien d’aujourd’hui et ne manque pas  (dans la conclusion) de citer La lettre à Diognète. J’ai aussi beaucoup apprécié sa vision du temps long,  sa liste impressionnante des « fiertés catholiques (p 210 à 214), son courage de ne pas éviter les sujets qui fâchent, son humour et son enthousiasme non arrogant.

Je mentionnerais toutefois trois regrets (outre l’allusion trop rapide aux Poissons roses) :

  • La défense de Charlie Hebdo : le mot « responsabilité » n’apparaît pas dans son plaidoyer
  • Sur le mal (il y consacre le  chapitre 11) : l’analyse est intéressante mais je suis surpris qu’il n’ait pas cité Simone Veil qui va jusqu’à dire en substance dans « La Pesanteur et la grâce » qu’il faut considérer le mal comme une marque de la miséricorde de Dieu.
  • Sur l’avortement : bravo pour le courage de sa position mais pourquoi n’avoir pas indiqué qu’on a en France plus 220.000 avortements par an et n’avoir pas protesté contre les dispositions prises pour empêcher les sites anti-avortements de continuer  leur activité.

Bref, je vous recommande vivement la lecture de ce livre (22 €). Il aide à réfléchir, il remet les idées  au clair et on en sort ragaillardi.

PO

NB je joins ci-dessous un extrait du mail en réponse que Denis Moreau m’a fait parvenir le 1er mars 2018

De votre point de vue, vous avez raison sur le fait que j’aurais pu parler davantage des « poissons roses ». Je ne l’ai pas fait parce que c’est dans mon esprit un livre généraliste, et que je ne voulais pas donner l’impression de m’affilier à un courant politique, aussi sympathique me soit-il. Du coup, comme vous le remarquez, il y a une sorte de contraste entre mes sympathies affichées pour vos idées (25 pages, au moins) et le laconisme de la note de la p.302. En d’autres occasions, j’essaierai peut-être d’être plus explicite. Je vais reparler des Poissons roses dans un entretien à paraître prochainement sur le site « Aleteia » (je vous dirai quand cela paraîtra ; je vais demander si on peut mettre un lien renvoyant au site des Poissons roses). 

Je vous remercie aussi de me proposer un « droit de réponse ». Mais je pense que je ne vais pas en user. Votre texte a sa cohérence, il est fort bienveillant à l’égard de mon livre, je ne crois pas utile d’y ajouter quoi que ce soit (sinon un chaleureux « merci » !).

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Patrice Obert

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